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Comme
un coquillage où l’on entend la mer, premiers poèmes en prose de
Jean-Daniel ROHART, marquent l’entrée en
littérature d’un écorché vif, scrutant non seulement les tréfonds d’une
problématique individuelle, mais retraçant aussi – par là même – les étapes
d’un itinéraire d’angoisses que ne renieraient pas jeunes et moins jeunes
d’aujourd’hui.
Jouant d’un arsenal hétéroclite
d’objets et de déchets (scories,
colimaçons, vieux ours en peluche, vide-ordures, vieilles vestes ou vieilles
chaussettes, boîtes de conserve, miettes et brisures), s’attardant à l’écoute
des vieilles pulsions – des vieilles chansons – de ce qu’il reste du nombril de
l’enfance, l’écriture de Jean-Daniel ROHART,
erre dans « l’escalier en colimaçon » d’un doux délire de métaphores
et de comparaisons à répétition qui abolissent et ravivent tour à tour
l’expression quotidienne du quotidien.
Tout autant que ce travail sur le
langage, tout autant que la fantasmagorie de hautbois et de « violoncelles
de barbarie » qui l’accompagne, le caractère finalement subversif d’une
démarche pourtant strictement
individualiste force aussi l’intérêt, en particulier par cette singulière
performance dans la conciliation des contraires : refus du réel qui est passion
du réel, pulsion de mort qui est frénésie de vivre, obsession du vestige et de
l’épave qui n’est que l’inconscient souci de redignifier ce qu’il reste d’un
apparent gâchis ; désespoir – sublimation et quête en même temps – qui
traduit l’amour profond d’un temps à retrouver, d’un paradis qui n’est mythique
que parce que provisoirement irréalisé.
Le genre frontalier de l’œuvre, à la
croisée de plusieurs langages et de plusieurs réalités, établit en tout cas une
synthèse originale entre le poème prolongé et le roman embryonnaire qui annonce
en J.D. ROHART un écrivain multiple,
total, entre le délabrement et le vertige de l’absolu, entre le tout et le
rien, entre l’exigence et le désespoir, entre l’amertume et la frustration,
entre l’effarement et la coquetterie, hérault attachant d’une fondamentale rage
de vivre.
A. M. D.
Comme un coquillage où l’on entend la mer (poèmes en prose)
Editions Saint-Germain des-Prés, 1977 (épuisé)
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